L'usine

J’ai passé toute ma journée entre les poutrelles métalliques d'une usine à l'abandon. Les particules d'amiantes, de rouille, de tissu synthétique imprégné d'urine de rats malade, et autres poussières grasses et collantes, je le sens, marinent encore dans les plis roses de mes jolis poumons de non-fumeur invétéré.

Durant ma visite, une alternance d'averses, de vent et de violentes éclaircies ébranla cette grande baleine de brique et de métal échouée prés de la rivière. Dans la carcasse, goutte à goutte verdâtres et luisances irisées douteuses renforcèrent ma sensation d'être un parasite mastiquant un chemin dans le ventre d'une immense charogne.

Le patron a récupéré ses billes il y a longtemps et joue avec sur les plages de Birmanie. Les derniers ouvriers agonisent lentement, tout nostalgiques, dans la maison de retraite à côté du crématorium.

Ce qu'il reste c'est de la poésie, celle des ruches sans abeilles, celle de la désolation, la même que celle des chagrins d'amour, et que celle de la cuillère qui tinte dans les ténèbres amers du café de ce jour.

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humour d'asticots
rien n'est plus vivant
qu'un cadavre

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