Juste après l'Aurore

Après vous Mademoiselle, l'Apocalypse c'est des vacances !

C'est normal de sourire, c'est humain, c'est même comme on dit une décontraction de l'âme, mais là mademoiselle c'était trop. Je suis sorti de votre sourire irradié.

Quelque pas plus loin, dans mon cœur une escalade, je me sentis incendiaire, j'imaginais brûler la terre entière par petits morceaux : les voitures, les maisons, les forêts, les champs de blé envahis de coquelicots, l'univers entier ruiné par la flamme que ce sourire imprévu avait planté dans ma poitrine.

Ce sourire infusé de gloussement et de bienveillances perverses vous l'avez tenu sans faillir, sans pudeurs, sans troubles, sans comprendre la tempête d'avenir illusoire dont il était l'engrais parfait.

Quelques pas plus tard, l'air brûlant et la chaleur moite de ce septembre caniculaire précipitèrent une explosion de foudre, de vent, et de pluies fouailleuses.

Votre chair je l'ai vu, vos yeux, vos dents, votre salive cachées dans ce sourire, votre bonheur, votre chance, votre jour, votre enfant, votre amour, votre intelligence, j'ai tout vu, tout était là, offert dans les vapeurs d'un produit d'entretien pour tapis roulant de caisse enregistreuse.

J'ai tout pris, et sous la pluie qui n'a rien refroidi, sous la fureur des éclairs qui excitait mon rire, j'étais comblé, heureux et tourbillonnant. Tout était clair, harmonieux, simple et bon !

Ton sourire (oui, on peut bien se tutoyer maintenant) est encore accroché sur mes lèvres, voilà, je le dépose sur le papier avant que la faucheuse qui passe souvent par chez moi l'emporte pour un enterrement lointain.

Après toi, l'Apocalypse, c'est des vacances...