l’araignée ~ une
main gracile sur mon épaule
Enfant j'ai dû te
rencontrer sur un muret, ou bien près d'un ruisseau au fond de la vallée jolie,
dans un pré. On regarde le monde, accroupis et pensifs. Une odeur de terre et
d'eau douce me revient, c'est toi. Le souffle d'un monstre derrière nous qui
affute ses antennes. On court la peur au ventre, d'ombre en ombre, de rêves en
rêves, de petits mondes en petits mondes.
passage secret ~ derrière
cette fleur un autre univers
C'est toi, j'en suis
sûr, dans ce vieux cloître calcaire. Le plancher de la bibliothèque, doré à la
cire d'abeille, grince sous tes pas légers. Le coin de ta robe envole des
galaxies de poussières dans les fins rayons de soleil.
une seconde ~ des
milliards d'étoiles dans la pupille
C'est toi encore la danseuse dans ce bazar au milieu du
désert. Dans ma besace, raturée par le diable en personne, ce grimoire convoité
par les Hashachines. Alors que ton sourire me traîne vers l'extase des étoiles,
ils en profitent pour faire entrer la lumière dans les recoins les plus sombres
de ma jugulaire. Je suis mort pendu aux lianes spatiales de tes iris de miel.
décollage
~ le pigeon lâche un duvet à la chute interminable
L'autre siècle, sur les toits fumants d'une capitale
brinquebalante. On miaule à la pleine lune, tissant des vers aux vapeurs
d'absinthe. Dans la rue les courtisanes cachent des poignards entre leurs
froufrou, tu me chuchotes en regardant.
le cœur de la rose ~ frisson d’une
guêpe
On s'est enivrés aussi. Tous les deux on a craché de concert
comme des punks sur les pensées bouffies des massifs d'une ville de verre fumé.
Nos rires de géants pleins de marguerites, de coquelicots et de folles avoines
à l'assaut des angles droits. Nos rires pleins d'étoiles arrosant de peinture
et d'étincelles l'obscur dessein des paysagistes urbains.
vent de nuit ~ les
étoiles font la roue sur les boulevards
Il y a mille
aventures où tu m'accompagnes. En Galice à la recherche d'une druidesse
aquatique, sur la lune pour les diamants, sur la piste du trésor des Anasazis
de la table verte, chez les Aléoutes souviens-toi, on a surfé des vagues
pleines de glaçon chez les Aléoutes, on a compté les moutons en Argentine et
sur une île déserte on a fait trente enfants uniquement nourris à la langouste
et au lait de coco...
marée basse ~ l’orchestre
range sa symphonie
Déjà vu...
... ce goût pour les vieilles choses, les chansons, la mousse sur les pierres, les arbres couvert de lierre, les forêts l'hiver, les loups, les rires sardoniques, les énigmes, les châteaux hantés, la solitude...